Josep – L’Histoire animée

Josep, sorti en septembre dernier, est le premier film du réalisateur Aurel. La spécificité de ce long-métrage ? Il s’agit d’un film d’animation dont l’essence même est historique tandis que ses nationalités sont multiples – à savoir française, espagnole et belge – homogénéité que l’on retrouve dans les doublures des personnages qui sont aussi bien françaises qu’espagnoles, dualité du langage péremptoire.

Le synopsis de ce dessin animé aurait pu être simple : un grand-père – Serge – sur le point de mourir narre son histoire de gendarme durant l’année 1939 à son petit-fils. Mais la singularité apparait dès les premières minutes du long-métrage. En effet, 1939 ne correspond pas seulement au début de la Seconde Guerre mondiale, mais aussi, et surtout, au mois de février qui est frappé par l’exil d’espagnols Républicains vers la France, souhaitant ainsi fuir la dictature franquiste annexant le pays. Serge, ce gendarme français, victime de sa situation, ne doit pas seulement observer cette situation dramatique, mais il devient aussi contre son gré acteur de cette infamie. Parmi tous ces « rouges », le regard accablé de Serge se fixe sur des mains dansantes, créant à même le sol des représentations de visages. Josep, Républicain, mais surtout dessinateur de talent, retrouvé emprisonné loin de sa fiancée.

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Annecy 2020 Online | La génération digitale

Alors qu’elle touche à sa fin, cette édition particulière du Festival d’Annecy laissera un goût amer pour beaucoup. Elle restera celle qui n’a pas eu lieu – pas réellement, en tout cas. Le choix courageux de mettre en place une solution numérique a permis malgré tout de découvrir la totalité des courts-métrages et quelques longs qui y auraient été montrés en temps normal… Il faut saluer l’exploit : ça a marché, ça a même très bien marché.

Parmi les courts-métrages, le triomphe du bulgare Theodore Ushev vient couronner un parcours exceptionnel. Sélectionné régulièrement à Annecy depuis les années 2000, son nouveau film Physique de la tristesse, dont il parlait déjà l’année dernière comme son projet le plus ambitieux, reçoit le prix de la critique internationale et le Cristal du court-métrage. Spectaculaire sur le plan visuel, Physique de la tristesse est en fait basé sur une technique jamais utilisée auparavant pour un film d’animation : l’encaustique. Il s’agit de diluer les couleurs dans de la cire d’abeille avant de s’en servir pour dessiner. Le rendu est étonnant et participe certainement à cette sensation puissante qui s’empare du spectateur pendant les presque trente minutes du film. On y perd facilement ses repères dans une structure narrative éclatée, mêlant les souvenirs – réels ou fantasmés, d’après ceux du roman dont s’inspire Ushev ou ceux du réalisateur. Une évocation mélancolique du temps, de la disparation, de la mort, du souvenir.

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Annecy 2020 Online | En ligne, ne te découvre pas d’un fil

L’une des conséquences du confinement et de la crise sanitaire aura été, vous ne pouvez l’ignorer, l’annulation d’un grand nombre d’événements ou de festivals qui devaient se dérouler au printemps ou à l’été 2020. Le Festival d’Annecy, auquel nous nous rendons chaque année avec un plaisir intact, aurait pu être l’une des nombreuses victimes du coronavirus. Bravement, l’équipe organisatrice a pourtant tenté de proposer une offre en ligne pour remplacer le festival physique.

Cette version online est accessible à tous, sur accréditation – payante, 15€ seulement – et donne accès aux courts-métrages, à (certains) longs-métrages, aux Work-in-Progress, bref à l’ensemble de la programmation à laquelle nous aurions eu droit en temps normal. Si forcément nous regrettons de ne pas pouvoir aller plonger nos pieds dans le lac annéciens entre deux projos, nous aurons l’immense joie de découvrir les films animés sélectionnés. Parmi les avants-premières très attendues : Petit Vampire, le nouveau film de Joann Sfar (Le chat du Rabin), adapté de sa propre bande-dessinée, ou Calamity, une enfance de Martha Jane Cannary de l’excellent Rémi Chayé (Tout en haut du monde). Citons aussi les nouveaux Patrick Imbert (Le Grand Méchant Renard) et Masaaki Yuasa (Lou et l’île aux sirènes, Mind Game), dont on découvrira les premières images durant le Festival. Mais c’est sur les choses qu’on ne connaît pas, dont on n’attend rien au premier abord, qu’on mise en premier. Annecy, c’est vrai, c’est d’abord le plaisir de la découverte et des surprises, et ça, on ne nous l’enlèvera pas.

Pour plus d’informations, rendez vous sur le site du Festival d’Annecy

Le Festival d’Annecy Online 2020 aura lieu du 15 au 30 juin.

J’ai perdu mon corps – Le formidable voyage d’une main

J’ai perdu mon corps, long-métrage d’animation réalisé par Jérémy Clapin, raconte l’histoire d’une main, celle de Naoufel. Séparée de lui, elle tente de le rejoindre. Pitch quelque peu étonnant, bien inhabituel, au résultat sensationnel.

En parallèle de la quête de la main, nous découvrons la vie de son propriétaire, avant leur séparation. Nous rencontrons un jeune homme dont le rêve de devenir pianiste et astronaute a été compromis : le voilà en livreur de pizzas maladroit. Son train-train quotidien est loin de le faire rêver ; jusqu’au jour où il rencontre, par le biais d’un interphone, une jeune femme. Il lui il voue alors un véritable phantasme, et va tout entreprendre pour la rencontrer. Continuer la lecture de « J’ai perdu mon corps – Le formidable voyage d’une main »

Les Enfants du Temps – Un rayon de soleil dans un ciel gris

Makoto Shinkai était, avant même le succès mondial de Your Name en 2016, un cinéaste écouté et attendu. Forcément attendu au tournant avec son Les Enfants du Temps, le réalisateur n’a pas dévié malgré la pression, et semble être poursuivi par les mêmes obsessions dans un monde qu’il décrit toujours plus sombre. Là où le dernier plan de Your Name nous laissait entrevoir un ciel bleu azur, c’est à l’inverse avec un ciel gris et une pluie fracassante qu’on est introduit dans Les Enfants du Temps. Continuer la lecture de « Les Enfants du Temps – Un rayon de soleil dans un ciel gris »

Les Hirondelles de Kaboul – Le chant des hirondelles restées libres

Y’a-t-il déjà eu un Kaboul libre ? C’est en exergue ce qui ressort de conversations croisées au fil des Hirondelles de Kaboul, long-métrage d’animation réalisé par Zabou Breitman et Eléa Gobbé-Mévellec. Un Kaboul en ruine, ravagé par la guerre, devenu le quotidien de ces familles, de ces enfants, de ces groupes d’hommes. Ces derniers s’amassent sur les places publiques pour assister – et participer – à une lapidation, devenue un spectacle de rue comme un autre. Les plus âgés se souviennent de la guerre contre l’Union Soviétique – même les plus anciens se souviennent qu’avant, c’était déjà la guerre. La paix et la liberté semblent des souvenirs lointains, un rêve entraperçu en passant devant de vieux bâtiments. Des traces ont survécu : cette librairie, ce « cinéma/théâtre », ou cette université dont on traverse les restes, comme des témoignages de ce qui a été, comme des témoignages de ce qui aurait pu être. Ce ton, ces accents que prend le film se retrouve dans son esthétique : cette peinture à l’aquarelle vient évoquer un souvenir, un trait doux où il manque quelque chose, l’espace n’est pas parfaitement rempli. Le dessin a quelque chose d’aérien. Continuer la lecture de « Les Hirondelles de Kaboul – Le chant des hirondelles restées libres »

Zombillenium – Ni plus, ni moins que des zombies

Si c’est drôle, alors ça va. C’est généreux, amusant, bref, en un mot divertissant. Dire que c’est excellent serait sans doute déjà trop en dire. Zombillenium, adapté de la BD éponyme, a de nombreux mérites qu’on s’efforcera de vous lister ici rapidement. D’abord, à en croire les réactions dans la salle, c’est fidèle à l’oeuvre originale (même réalisateur, donc pas une énorme surprise). C’est assez fin dans la mesure où les pics touchent juste. On rit beaucoup, on en sort satisfait. Cette satisfaction d’avoir vu un bon film.

Au-delà de cela, l’intérêt de Zombillenium, c’est la forme. Le film aura pris 6 ans à être produit, ce qui est énorme quand on y réfléchit. C’était si difficile que le réalisateur-auteur avoue qu’il n’aurait pas eu le temps d’écrire de nouveaux volumes à sa BD, trop pris par la production. Mais dans ce cas là, quel sens à donner à cet investissement ? Quel est l’apport fondamental d’avoir consacré tout ce temps, toute cette sueur pour un long-métrage de 1h30, si ce n’est pour qu’il ne reste qu’une parenthèse ? Sans doute le film profitera de sa base de fans pour subsister, trop heureux de découvrir une histoire inédite.

Zombillenium, c’est un peu un concentré pop, pulp, urbain. C’est frais et c’est bien fait. En plus, c’est français. Bref, difficile de ne pas vous le recommander chaudement, que vous connaissiez ou non l’oeuvre de base. Une manière de soutenir un cinéma d’animation qui, en France, possède de nombreux mérites et dont le développement s’avère particulièrement intéressant depuis quelques années – grâce à des films tels que Ma Vie de Courgette, Ernest & Celestine, Tout en haut du monde

Zombillenium (2017) de Arthur de Pins et Alexis Ducord, avec E. Curtil, K. Marot, A. Tomassian. Sortie le 18 octobre 2017.

[Annecy 2017] La conscience politique de l’animation européenne ?

Le hasard fait parfois bizarrement les choses. Deux films hors-compétition que nous avons pu découvrir le 13 juin dernier se sont fait un écho inattendu. Deux films européens, racontant des histoires vraies, et utilisant un mélange d’animation et de prises de vues réelles. C’est, en fait, les points communs principaux au premier abord entre le film-documentaire de l’allemande Katrin Rothe et la coproduction entre la Norvège, la Pologne et la Lituanie réalisée par Anne Magnussen et Pawel Debski. Il existe ainsi dans les deux films un propos éminemment politique, ce qui dans l’Europe d’aujourd’hui ne tombe pas dans l’oreille d’un sourd. Nous ne pouvions que revenir sur ces films, ensemble, pour essayer d’en comprendre les enjeux et les messages.

1917, The Real October (All, de Katrin ROTHE)

1917, The Real October est un film allemand, réalisée par la documentariste Katrin ROTHE. La particularité de son style est l’utilisation de marionnettes et de découpages pour retranscrire ici la Russie de 1917. On ne peut pas nier l’intérêt de sa démarche : essayer de reconstituer, dans une logique purement historiographique, les événements étant survenus entre février 1917 et octobre 1917 à travers les œuvres, les journaux, les mémoires des artistes de l’époque. L’intérêt réside dans la différence des lectures que chacun fait de ceux-ci : qu’ils soient des témoins lucides ou acteurs déçus, tous verront bien entendu leur vie bouleversée.

Dès lors, on peut s’intéresser au choix de l’animation : pourquoi ne pas avoir privilégié les images d’archive ? La réponse peut sembler surprenante, mais c’est en fait une mise en abîme intéressante : l’artiste est acteur de son époque, de son environnement social et politique. Comme ces artistes russe ont été actifs à différents degrés pendant la révolution de 1917, Katrin Rothe l’est aussi un siècle plus tard, en utilisant un procédé artistique. On sait l’influence qu’on eut les différentes révolutions européennes (la révolution française et la révolution russe notamment) sur les idéologies politiques actuelles, mais on oublie qu’elles ont engendré des contre-réactions défavorables aux artistes. Comme le film le dit lui-même, la révolution de février 1917 a apporté la liberté d’association, d’expression… avant de les supprimer parce que défavorable à la logique révolutionnaire. La force de notre époque, c’est justement notre liberté concrète et fiable de pouvoir s’exprimer, de pouvoir critiquer. Ce qui est d’ailleurs le rôle de l’artiste. L’animation permet ainsi à Katrin Rothe de montrer, au-delà des personnages principaux, les silhouettes sombres des révolutionnaires et des squelettes formant les décors, vides, de plus en plus froids, sombre. L’utilisation des prises de vues permet aussi de mettre en perspective ce qui est raconté : c’est un travail de recherche, de reconstitution narrative qui a conduit au film. Cela donne au travail d’historien du film un côté beaucoup plus intuitif qu’une thèse abstraite et conceptuelle.

The Man who knew 75 languages (Norv./Pol., de Anne MAGNUSSEN, Pawel DEBSKI)

La coproduction norvégienne/polonaise/lituanienne (oui, c’était possible!), The Man who knew 75 languages, est une œuvre aussi fascinante. Mélangeant prises de vues réelles et animation, le film raconte l’histoire vraie de Georg Sauerwein. Né allemand durant la première moitié du 19e siècle, il passera sa vie à se battre pour la protection des patrimoines culturels et linguistiques dans toutes les régions d’Europe. Doté d’une capacité d’apprentissage des langues hors norme, il sera notamment le tuteur de celle qui deviendra la première reine de Roumanie et avec qui l’histoire d’amour constituera le fil rouge tenant le récit. L’intérêt du film étant bien entendu ailleurs, dans son discours politique, du droit à l’identité, aux racines, qui trouve un écho de nos jours. L’Europe de cette période est déchirée par les guerres permanentes qui vont conduire à la formation de nouveaux États et des frontières contemporaines.

Les prises de vues réelles renforce cet aspect : les châteaux, les plaines, ce n’est pas une reconstitution avec des dessins, ce sont de vrais lieux, de vrais personnages : ce sont des faits, palpables. Seul regret, le fait que le film ne dure qu’une heure, donnant un côté anecdotique à certaines scènes – comme l’écriteau au début qui précise qu’il fut le premier à réaliser un dictionnaire anglais/turc. La vie de cet homme mériterait une œuvre encore plus ambitieuse. Sa biographie, que le film adapte en partie, n’est malheureusement disponible ni en français, ni en anglais…

Si la probabilité de pouvoir voir ces deux films dans les salles françaises est faible, il nous semblait intéressant de mettre en avant ces projets à la fois si différents au premier abord, mais très proche en réalité, en vous encourageant vivement à vous intéresser aux sujets portés par ces films.

[Annecy 2017] Dans un recoin de ce monde de Sunao Katabuchi

Prix du Jury – Annecy 2017

Le cinéma japonais regorge d’œuvres traitant du traumatisme de la seconde guerre mondiale, et dans l’animation particulièrement. On redira l’importance de voir Le Tombeau des Lucioles d’Isao Takahata, traité pacifiste d’une justesse inouïe, œuvre bouleversante, horrible, mais au combien nécessaire. Le film de Sunao Katabuchi ne pouvait que souffrir de la comparaison. Ironiquement, c’est un ancien de Ghibli. D’abord storyboarder, il n’a depuis 2002 réalisé que trois films : Princess Arete (2002), Mai Mai Miracle (2009) et Dans un recoin de ce monde (2017), ce dernier ayant été particulièrement bien reçu par la presse japonaise. L’histoire de cette jeune fille – Suzu – un peu simplette parfois, confrontée à la guerre, n’est pas exempte de défauts.

On ne peut pas nier que c’est un film critiquable sur le fond. En effet, si le public japonais ne pouvait pas faire ce reproche au film, le public européen doit le rappeler. Lorsque le film donne une vision idéaliste de la situation des civils durant la guerre, c’est une lecture orientée : le film d’Isao Takahata le montre. Lorsque, dans le film, la police arrête Suzu parce qu’elle faisait des dessins de bateaux militaires et donc de l’espionnage, on ne peut pas en rire derrière (« elle est pas assez maline pour être une espionne ! », disent-ils). De la même manière, la fougue nationaliste cachée par les beaux atours du film n’est pas quelque chose de rassurant. La politique de colonisation menée par l’État japonais durant la première moitié du 20e est passée sous silence… Toutes les horreurs arrivant au Japon sont la faute des américains : ce n’est pas totalement faux, ni totalement vrai. Aucune guerre ne peut se targuer d’être parfaitement propre. La guerre est un état où personne n’est tout blanc, tout noir.

Mais au-delà de ces soucis qui limitent la portée universelle du récit en l’ancrant profondément dans la logique politique contemporaine du Japon (un retour du nationalisme), on ne peut nier que le film remue. Il remue, il marque profondément. La direction artistique est superbe, le sujet est difficile et le film s’en sort bien. La dernière partie est ainsi beaucoup plus sombre (1944-1945), plus violente. Il reste difficile de sortir totalement indemne du film. Le personnage de Suzu donne ainsi une véritable leçon de courage, quelque chose de respectable dans la mesure où peu d’œuvres ont traité le sujet de cette manière. Le titre, Dans un recoin de ce monde, reflète bien de cette idée : ce comportement reste marginal, associé à un « recoin », un morceau, un angle. Comprendre, un petit espace de verdure, dans la noirceur de ce monde.

Sortie en salle prévue le 13 septembre 2017

[Annecy 2017] A Silent Voice de Naoko Yamada

Si son nom ne vous dit rien, Naoko Yamada n’était connue que pour les adaptations en séries et en films de quelques mangas populaires : K-On! en 2009 et Tamako Market et 2013. Les deux licences laissaient penser que cette adaptation en long-métrage d’un autre manga à succès, A Silent Voice, se caractériserait aussi par sa niaiserie, un côté guimauve pas forcément déplaisant, mais relevant du plaisir coupable du samedi soir. La surprise est donc énorme, au vu de la densité du récit, l’ambition du projet, de ses thèmes… Bref, la qualité d’un travail de cinéaste ayant su trouver le juste milieu dans le difficile dosage de ses effets.

Shōya avait à l’école pour habitude de s’amuser en harcelant une jeune fille sourde, Shoko. Il décide finalement après quelques années, d’aller s’excuser. Il sera difficile de résumer en quelques mots de manière plus précise un scénario aussi riche. Ce dernier ne prend d’ailleurs jamais par la main le spectateur, chose appréciable, sans pour autant le perdre s’il ne connaît pas l’œuvre originale (cas de l’auteur de cette critique). On salue ainsi la justesse du rythme et des choix de scénario permettant de comprendre les évolutions du personnage principal sans problème malgré les effets crées par un montage en flashback qui aurait pu rendre le tout assez difficile à suivre. D’ailleurs, la dureté des sujets traités, comme le harcèlement ou le handicap, est adoucie par un humour maîtrisé qui surprendra un peu moins de la part de la réalisatrice, qui use des mêmes ficelles que sur ses anciens projets…

Le thème véritable du film – la question de la parole – est abordé ainsi de manière remarquable. L’absence du langage produit ainsi des comportements violents pour surmonter cette incapacité à la communication. Ces rapports de violence se caractérisant par le harcèlement de cette jeune fille : elle est littéralement handicapée, et il est impossible pour les autres enfants de comprendre ce qu’elle essaie de faire, de dire. Mais c’est aussi entre les personnages pourtant doté de la possibilité de parler que cette violence existe. Elle existe lorsque Shoya refuse (ou échoue?) à écouter et à voir les autres, ce qui est représenté à l’écran par d’énormes croix barrant les visages de tous ceux qu’il croise. Plus encore, la thématique du suicide (qui est une violence envers soi-même) est largement présente dans le film. Incapable d’accepter que sa capacité à comprendre l’autre et à se faire comprendre pouvant conduire à tenter l’irréparable. Bref, ce n’est que quelques pistes dans une œuvre particulièrement fouillée et digne d’intérêt. Inutile de dire que le film – une surprise – est une véritable découverte (ou redécouverte?) d’une réalisatrice dont l’on attendra désormais vivement les prochains projets.

 

Sortie directement en DVD prévue en France début 2018